Jardin d'hiver.
Aquarelle passée, les pluies du Nord détrempent le paysage. Le ciel se teinte d'ocre au contact des briques, les contours se mêlent. Les bières du Nord ont le goût de ces nuages épais et mauves. À la fenêtre, les miettes de gâteau dans la fourrure du chat, des petits biscuits ramenés de Belgique aux parfums épicés et chaleureux. Saveur incomparable lorsque les gouttes d'eau abîment la couverture neigeuse, froissent l'esquisse des flâneries félines, troublent les empreintes discrètes du merle.
Tempête de grêles sur la digue, un mauvais titre de roman de gare, et pourtant. L'avancée téméraire vers le phare rouge délavé, le triomphe de la photographie souvenir au bord de la jetée, la mer enfin solitaire.
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Les arbres, en rang serrés, élégamment courbés comme les danseuses de Degas, tendent une branche vers la route, prêts aux entrechats. Pollini tempère très bien son clavier (moins énervé que Glenn G.). Nous sourions des noms curieux, en flamand Lille devient Riesel – n'y voir, surtout, aucun esprit de contradiction. La belle Bruxelles se dévoile généreusement.
Bien sûr, il faut aller (sur les conseils précieux d'une amie qui connaît bien mes goûts) chez Dandoy. Renseignement pris, ils ne font de speculoos en forme de chat qu'en dehors des fêtes de Noël. Ce qui n'est pas une raison pour repartir sans un petit paquet de biscuits, ce sont les meilleurs (du monde). Craquants, épicés justement et subtilement, pas trop gras, loin des biscuits du commerce mous, arôme cannelle, gras saturé écoeurant.
Il faut aussi aller chez Marcolini (merci G.) (et de préférence le samedi, les explications sont lumineuses – on nous a même soufflé que Pierre H. les supplie de faire un grand cru de couverture). Luxueux, certes. Le chocolat chaud est délicieux, épais, parfumé. Le chocolat Tabasco, fève blanche du Mexique, est fruité, acidulé, intellectuel, réveille le palais sans agression aucune. Le Fleur de Cacao, métissage du Venezuela et du Ghana, développe des arômes de miel des montagnes, de feuilles de Havane, cocon un peu doucereux et élégant, c'est un chocolat de boudoir précieux.
Promenades dans les rues pavées à l'affût des murs de bandes dessinées, pas la peine d'aller voir le Manneken Pis, il est partout.
De Bruegel à Magritte, bien sûr. Voir la poésie. (loin des audioguides importuns, piaillant des inepties à usage unique, dressant le regard et saccageant la spontanéité)
« Il s'est trouvé quelqu'un d'assez malhonnête pour dresser un jour, dans une notice d'anthologie, la table de quelques-unes des images que nous présente l'œuvre d'un des plus grands poètes vivants ; on y lisait : Lendemain de chenille en tenue de bal veut dire papillon.Mamelles de cristal veut dire : une carafe, etc. Non, monsieur, ne veut pas dire. Rentrez votre papillon dans votre carafe. Ce que Saint-Pol-Roux a voulu dire, soyez certain qu'il l'a dit. » (A. Breton)
Se restaurer simplement. Un verre honnête de blanc, un tartine guacamole, pamplemousse, truite fumée. Un tiramisu aux macarons. En profiter pour faire une provision de leurs énormes pains, acides et presque râpeux. Merveilleux avec du beurre salé, une confiture cassis-groseille de cet été. (j'en connais qui seraient ravi(e)s)
http://www.lepainquotidien.com/
( apparemment, c'est devenu une chaîne, mais l'originale est à Bruxelles)